Kalachnikovs

Quel combat cette semaine ! Les Quebec Iron Knee Caps ne s'étaient pas présentés à l'Iron Field pour faire de la figuration ! Sortis comme des balles de leurs vestiaires, les attaquants asiatiques, armes au poing et entonnant les chants traditionnels à la gloire de Ghengis Khan ont longtemps échoué sur le mur défensif adverse, avant finalement de trouver LE trou de souris. Gloire au vaincu pour ce match qui a tenu tout un peuple en haleine devant les écrans de retransmission géants du Dynamo Cerüün, jusqu'au terme du dernier quart temps, générant sur le but final de Shotgun une véritable scène d'hystérie collective, les holospectateurs se levant et hurlant la bave aux lèvres. Quelle ambiance ce sera quand l'équipe jouera vraiment dans son stade, dimanche prochain...

Le nom de Métal Hurlant, scandé, est descendu par vagues des tribunes, noyant la retransmission dans un magma sonore. Le coach étranger, vainqueur du championnat de Golden 2102 devant Anchorage et finaliste de la coupe 2105, venu s'exiler dans un club anonyme perdu dans les steppes, délaissant une pléiade de stars dont les exigences avaient fini par tuer son goût pour le jeu, s'est alors levé, dressant les bras aux cieux tel un gladiateur de l'ancienne Rome.  Montant sur une estrade couverte d'un dais de soie et d'or aux couleurs des Kalachnikovs, faisant taire le grondement sourd des tambours de guerre, Métal Hurlant s'est alors adressé à la foule :

"J'ai pour ce club auquel je voue un amour immodéré les mêmes ambitions que vous : immenses. Nous devons pourtant garder les pieds sur terre : sportivement les matches les plus difficiles restent à jouer. Quand on veut monter en ligue d'argent, c'est la fin de saison qui est âpre, celle où l'on doit se battre chaque semaine à la massue * contre ses adversaires directs. Nous connaitrons encore la défaite cette saison ! Mais soyez-en assurés, le corps de chacun de nos joueurs portera des stigmates pour chacune de nos défaites. Les voyant nus en fin de saison vous pourrez dire notre parcours. Mon préparateur physique, mon bras droit, descend d'une vieille lignée mongole qui a su perpétuer les traditions de la Horde d'Or. Tous vous savez bien ce que celà signifie : quand on signe à Oulan-Bator, on signe avec son sang, on se donne tripes et cervelle * à son club. On devient une machine, un sportif qui, soit s'épanouira et deviendra l'égal des plus grands héros antiques, soit finira crevé comme un chien dans la boue des caniveaux bordant le stade, sous vos crachats légitimes. A la semaine prochaine."

* expression mongole, NDLR